Lester B. Pearson
Nul n’ignore ici que le Canada français est actuellement profondément mécontent de sa place dans la confédération. Il y a à cela des raisons complexes d’inégales importances. J’ai dit et je répète aujourd’hui que la plupart de ces raisons sont parfaitement fondées.
- Discours d’ouverture, Conférence constitutionnelle de février 1968
Pour être Québécois, il suffit d’habiter le Québec ! Sans l’indépendance, les Canadiens-Français devront continuer de défendre âprement leur existence. Avec une indépendance trudeauiste, ils devront s’affirmer face à une diversité qui monte et braver la résistance des châteaux-forts anglo-saxons. Les deux perspectives commandent le retour politique des Canadiens-Français. Si vous avez compris qu’une identité de « Québécois francophones », provinciale et linguistique, a coupé le souffle de notre épopée, qu’elle supprime notre légitimité et nos droits historiques, vous avez compris l’essentiel.
Je souhaite montrer, dans l’essai qui va suivre, qu’entre les pensées trudeauiste et « néosouverainiste », les similitudes sont frappantes.
- Souveraineté et hypermodernité. La trudeauisation des esprits
Et c’est au moment où nous nous préparons à résister aux armées d’invasion d’un puissant voisin qu’on nous enlève les libertés dont nous jouissons après les avoir gagnées par un siècle de luttes! Mais il me semble qu’on devrait plutôt nous donner de nouvelles garanties de sécurité pour nous engager à combattre des adversaires aguerris, dix fois plus nombreux, et dont l’organisation politique est moins hostile.
Comme notre constitution n’a rien prévu de tel parce qu’elle était une concession du conquérant aux Canadiens-Français, de la mère patrie aux coloniaux dans le cas des Canadiens anglais, nos États généraux sont indubitablement l’effort le plus systématique, le plus compréhensif, le
plus réussi qui ait jamais été tenté pour constituer une véritable Assemblée nationale du peuple canadien-français en vue d’établir sa constitution.
La disparition des nations ne nous appauvrirait pas moins que si tous les peuples étaient faits pareils, avec un même caractère, un même visage. Les nations sont la richesse de l’humanité, elles sont ses personnalités généralisées : la plus petite d’entre elles a ses propres couleurs particulières, et incarne une facette particulière du dessein de Dieu.
Et ma peine est d’avoir finalement réalisé qu’il a surtout été trompé par ses chefs et ses élites qui se sont emparés de son combat et de ses rêves pour servir, celui-ci ses propres intérêts, celui-là sa vanité et cet autre sa soif du pouvoir, de voir encore se profiler à l’horizon cette «procession de chiens crevés – hurlait un Groulx courroucé – qui s’en vont au fil de l’eau, symbole poignant d’une race trahie par ses chefs».
- Lettre à Michel Lacombe, journaliste et coauteur, avec Gérard Bouchard, du livre Dialogue sur les pays neufs, Boréal, 1999