Foire aux questions - Une politique nationale canadienne-française

La Fédération des Canadiens-Français (FCF) est une communauté de réflexion et de communication non partisane vouée à l’unité nationale. Elle vise à rétablir le courant entre les Canadiens-Français de partout, dont les Québécois francophones font partie.

La FCF croit nécessaire de réhabiliter l’édification nationale commencée avec le Canada de Nouvelle-France. Elle estime qu’on ne peut pas manquer de fidélité à notre identité nationale sans céder au colonialisme. Notre nation a déjà traversé des siècles en portant son nom sur son front. Les Canadiens d’antan, aujourd’hui Canadiens-Français, ont encore un destin historique, ils veulent se porter à l’assaut du temps, avec le même drapeau, la même langue et la même identité historique. S’il est vrai que l’existence d’une Province of Quebec, apparue sous le régime anglais, fait de tous les habitants du Québec des Québécois, cette identité contractuelle et civique efface les Canadiens-Français qui en constituent le noyau le plus ancien et le plus durable.

Le Canadien-Français est la continuité du Canadien apparu en Nouvelle-France. C’est le même peuple. Après la Conquête, le nom canadien a dû s’adapter à de nouvelles réalités. L’ajout de Français à Canadien s’est faite à partir du moment  les Anglais ont commencé à s’appeler eux-mêmes Canadian. Ce n’était pas leur nom, mais ils l’ont pris. De notre côté, il n’était pas question de leur céder. Il a cependant fallu ajouter français, d’abord en cas de traduction. Inversement, les Canadians ont dû accepter eux aussi d’être désignés comme English Canadians, alors qu’ils auraient été satisfaits qu’on les appelle simplement Canadians. Continuer de s’appeler Canadiens-Français, c’est leur rappeler l’usurpation coloniale de notre nom.

Notre peuple ne peut assurer pleinement son avenir en s’affirmant dans les limites d’une « langue publique commune ». Plus d’ambition s’impose, il faut oser déployer notre patrimoine dans toutes ses largeurs, il n’y a pas de nation sans culture nationale.

À l’écrit, la graphie que nous retenons est celle qui rend insécable le vocable Canadien-Français avec ses deux majuscules et son trait d’union.

D’abord, il faut le rappeler, Province of Quebec est une création du régime anglais peu après la Conquête. Par conséquent, nous n’avons aucun devoir de fidélité envers cette appellation ou ses dérivés. Pour la petite histoire, en 1969, on appelait Québécois le Canadien-Français indépendantiste. Jean Bouthillette vantait l’adoption du vocable québécois, « une identité sans confusion », écrit-il.

On se réveille aujourd’hui dans la québécitude. Nous prenons conscience des revers successifs accumulés depuis cinq décennies par ce qui est graduellement devenu une dénationalisation, un néonationalisme taillé sur la doctrine de Pierre Elliot Trudeau.

Le sens de Québécois est passé de Canadiens-Français indépendantiste à sympathisant du Parti québécois pour finir dans l’ambivalence. On l’emploie sans savoir si l’on parle de la population qui habite le Québec ou de celle qui se réclame d’une nation majoritairement francophone.

Conscients du malaise, les Canadiens-Français, relégués dans une identité québécoise, continuent à défendre leur particularité sans en avoir les moyens. Ils cherchent à recréer leur distinction en modifiant un vocable québécois au sein duquel ils ne se sentent plus représentés. Ce fut d’abord Québécois francophone. Ce fut peine perdue, une immigration maghrébine, elle aussi francophone, grossissait sans s’intégrer. Une autre tentative de réchapper la distinction canadienne-française sans quitter le vocable québécois a été de se dire Québécois de souche. Louable, mais imprécis. Avec la loi 99 (2000), il est devenu clair qu’un Québécois de souche peut difficilement être autre qu’un membre des onze Premières Nations reconnues par Québec. Les ambiguïtés de la québécitude sont en train de faire de nous un peuple sans nom.

La nation civique correspond à un ordre administratif, une superstructure politique, un État. C’est un concept légal et territorial au sein duquel se retrouvent le plus souvent des populations différentes. Si l’équité entre les individus n’est pas trop malmenée, en revanche, le traitement réservé à la communauté canadienne-française par rapport à d’autres communautés pose un problème. Les Canadiens-Français sont exclus de la large diversité civique du Québec, définie et entérinée par la loi 99 (2000), un accroc de taille aux principes très prisés de l’inclusion.

Si les Québécois forment dans l’ensemble une nation civique provinciale, ils ne forment pas une nation au sens sociologique. Par conséquent, la province de Québec ne dispose pas d’un droit à l’autodétermination au sens du droit international. Les Québécois, comme peuple diversifié, au sens de la loi 99, ne disposent pas davantage d’un tel droit. Cette réalité a d’ailleurs été admise dès le départ par Claude Morin, grand décideur du PQ, qui proposera de contrer le manque de légitimité du Québec à se séparer par la tenue d’un référendum.

La nation ethnique est une nation sociologique, culturelle et historique. La nation canadienne-française correspond bien à ce type de nation. Ethnique n’est pas un gros mot. La nation ethnique est fort répandue sur la planète, on en compte plus de 500. Après quelques précautions prises quant aux tribus et groupes primitifs, on dira avec T. Delos et A. Soljenitsyne que l’apparition de la nation dans l’histoire témoigne d’un phénomène de civilisation. Elle a donné naissance à des patrimoines qui enrichissent l’humanité. La nation ethnique a non seulement des qualités, mais elle a aussi des droits. C’est elle qui détient un droit à l’auto-détermination au sens du droit international. Naturellement, il reste encore à le faire valoir.

La nation canadienne-française est formée des Français acclimatés devenus Canadiens. Restés sur place après la Conquête ils n’ont jamais cessé de s’affirmer. Au fil du temps, nombreux sont ceux qui, venus d’ailleurs, se sont fondus dans leur destin pour devenir indistinctement des Canadiens-Français à leur tour. Cette capacité d’intégration manifeste des immigrants a cependant été mise en doute, au point d’être tenue pour une impossibilité. On notera que le cosmopolitisme québécois a ses obligations : aucun appel n’est lancé aux immigrants pour rejoindre les Canadiens-Français ! Le multiculturalisme qui gangrène le Québec semble l’interdire. Nous sommes certes une nation ethnique, mais elle a toujours été accueillante et très éloignée du tribalisme ethnique que l’on rencontre chez d’autres nations reconnues par Québec. Les nations ethniques ne sont donc pas toutes pareilles !

Yves Frenette dans sa Brève histoire des Canadiens-Français dit nous parler d’un peuple qui n’existe plus. Membre de l’Ordre royal du Canada, il nous fait une histoire sociologique où prennent place les fragilités démographiques, l’urbanisation et le déclin des institutions cléricales. Cette nouvelle réalité, qu’il s’emploie à décrire, occulte cependant l’oppression nationale et l’assimilation organisée par les maîtres anglo-saxons du pouvoir. L’histoire sociologique fait barrage à l’histoire politique. Y a-t-il de quoi se surprendre ? Après la répression des Métis, la discrimination scolaire, l’interdiction des écoles françaises, l’obligation pour les fonctionnaires de travailler en anglais, que manque-t-il dans cette histoire des rapports politiques ?

Il manque la loi sur les langues officielles, qui fera de la langue maternelle la matière d’un choix individuel, séparé, du reste, de toute culture nationale. L’insensibilité anglo-canadienne et celle de Trudeau en particulier à conserver des institutions rattachées au peuple fondateur canadien-français est un ethnocide en douce. En réalité, la nation canadienne-française n’a jamais officiellement existé, si ce n’est les Articles de capitulation de Montréal et de Québec et à quelques endroits dans le Rapport Durham. Pour le reste, ni Québec ni Ottawa n’ont jamais reconnu la nation canadienne-française dans des textes officiels.

Entre la réalité d’une nation incarnée dans l’histoire, une nation de facto, et sa reconnaissance de jure, le fossé reste toujours à combler. Le Projet de Panthéon des Canadiens-Français, mis en vedette avec ce site, illustre quelques-uns des grands serviteurs de la nation. Ils en ont jeté les assises et ils la projettent dans le temps. Alors que Québec et Ottawa ont reconnu des nations de quelques milliers, voire de quelques centaines de ressortissants, pourquoi la nation canadienne-française serait-elle l’objet du silence de Québec et d’Ottawa ?

Si tout ce qui précède peut être considéré comme un plaidoyer contre la québécitude, il n’est pas superflu d’en cerner plus précisément les contours. La québécitude est le résultat d’une idéologie qui a produit un nouveau récit de la réalité nationale prétendant nous affranchir d’un passé « traumatique », dont la mémoire ne mériterait même pas d’être conservée.

La Loi 99 représente un aboutissement de la québécitude. Avec cette loi coïncident souveraineté et référendums, aucune référence à un passé plus ancien ne vient justifier la souveraineté. D’ailleurs, selon la québécitude, l’histoire qui nous a été enseignée était farcie de mensonges cléricaux, comme l’ô Canada, œuvre pieuse et « fédéraliste ». La dénationalisation se poursuit. La québécitude confie à un immigrant de première génération le soin de définir le peuple québécois dans une loi statutaire.

En réalité, notre épopée française d’Amérique, qui jouit encore par sa population d’une masse critique sur les rives du Saint-Laurent, est menacée par la déculturation. La québécitude a fait des Canadiens-Français des Québécois comme tout le monde, c’est-à-dire une masse d’Anglo-saxons culturel. Si tout espoir n’est pas mort, après 60 ans d’une ré-éducation qui tient grâce à la puissance du mondialisme, il faudra écarter le référendisme et d’autres distractions afin de reprendre, point capital, notre nom historique de Canadiens-Français. C’est dans cette volonté de faire un avec nos origines que l’avenir pourra reprendre les couleurs de notre personnalité.

La loi de 1969 sur les langues officielles a implanté le bilinguisme dans la fonction publique fédérale. C’était une revendication historique chez les nôtres, mais nous disons néanmoins qu’elle constitue une grave défaite des Canadiens-Français.

À cette époque, au Québec, on a voulu croire que la majorité francophone provinciale était opposable au régime fédéral. S’il pouvait apparaître flatteur de se dire en majorité francophone à l’intérieur de la province, et donner à ces paroles le sens d’un acompte sur l’indépendance, Québec ne restait, hélas, rien de plus qu’un sujet fédéral. Les invalidations successives de la loi 101 par la Cour suprême rappelant brutalement, quelques années plus tard, de quel côté loge la vraie majorité. La québécitude, grande créatrice d’illusions, voulait oublier que la personnalité politique et légale du Québec ne cessait de se définir d’abord par son appartenance au Canada.

La désignation de la province comme de majorité francophone par la loi sur le bilinguisme était un piège. Invoquant abusivement un principe de symétrie, P.E. Trudeau inventait une cause commune qui devait unir les minorités francophones hors Québec et à la fausse minorité anglophone du Québec. C’est ensuite par l’intermédiaire des provinces, les dix provinces, que se compléta le morcellement géographique du Canada français. De nation à l’échelle d’un continent, elle finissait recadrée dans les dimensions provinciales. De plus, avec la loi de 1969, la langue était maintenant dénationalisée. Elle devenait une affaire de banales préférences individuelles. Québec emboîtera le pas, nuançant avec une langue publique commune, mais sans culture officielle, comme l’avait voulu Trudeau, dès 1971. Il aurait fallu pour le Québec une souveraineté linguistique et culturelle inscrite dans la constitution avant de pavoiser; il aurait fallu plaider avec énergie le caractère indivisible des nations minoritaires canadienne-française et acadienne. Mais cela, c’était plutôt la politique de Daniel Johnson et la québécitude ne voulait pas perdre de temps avec d’inutiles négociations.

C’est connu, les souverainistes québécois ont le fédéralisme en horreur. Ce type de régime constitutionnel est pourtant répandu dans le monde, on en compte plus de 25. En réalité, si on met les choses à l’endroit, ce ne sont pas les possibilités de la formule fédérale qui sont ingrates, mais la version canadienne, établie de manière à nier l’existence des nations internes : Canadienne de souche et Acadienne, pour les faire disparaître.

Depuis le début, les Canadiens-Français ont voulu lever une ambiguïté d’un fédéralisme, qui était perçu comme une menace existentielle. La Confédération était-elle un pacte ou une loi ? En 1969, des négociations depuis longtemps attendues se tenaient enfin. Devaient-elles faire triompher la thèse centraliste ou la thèse provincialiste ? C’est alors que Daniel Johnson, plaide clairement la thèse des deux nations avec une force inégalée. Ce sera la dernière fois. Par la suite, les forces qui voulaient conclure un fédéralisme des nations ne s’exprimeront plus, la cause ne sera plus un enjeu constitutionnel. Porteurs de thèses irréconciliables, les indépendantistes québécois et les trudeauistes voudront, chacun ayant sa propre raison, mettre une fin à la nation canadienne-française. Les nouveaux premiers ministres du Québec négocieront à la baisse avec une légitimité branlante, ou se perdront pour des années dans les limbes référendaires. Les Canadiens-Français perdront l’initiative. La Loi constitutionnelle de 1982 donnera la réponse du maître du jeu à leur malaise existentiel. Elle signera de manière définitive la perte de pertinence d’un camp souverainiste devenu impuissant.

Quand elles ne peuvent tenir un État à leur seul profit, les nations enracinées cherchent néanmoins à posséder des institutions, à conserver leur langue et à préserver leur patrimoine culturel. Elles aspirent à faire reconnaître leur existence politique et à la protéger par des garanties constitutionnelles. Le nationalisme des nations opprimées a rarement pour but l’exaltation ethnique, mais la reconnaissance de droits. Ceci ne les protège pas contre les occasionnelles calomnies alimentées par le chauvinisme de l’oppresseur. En cherchant l’idéal, la québécitude a sacrifié le possible. Devenue risible, la doctrine souverainiste a suivi en toutes choses l’évolution de la Constitution canadienne pour en intégrer les valeurs dans sa propre doctrine ; si elle le pouvait, elle ferait du Québec un petit Canada.

Les Anglo-saxons, puissance maritime hégémonique, éprouvent toujours beaucoup de mal à rendre justice à leurs sujets conquis. L’histoire des deux Canadas en témoigne à toutes les pages. L’État du Québec appartient au Canada et lui est subordonné, alors que l’État fédéral est subordonné à NORAD, à l’Alliance des Five Eyes et à l’OTAN.

Les dangers s’accroissent de nos jours. De puissants intérêts particuliers, le plus souvent occultes à leur sommet, s’emparent de toutes les technologies de l’information que la science peut produire. Une course au pouvoir global, que rend possible la concentration de l’information numérique, inquiète les esprits les plus sereins. L’individu, la région, la nation, l’humanité même, sont à risque de devenir les jouets d’un pouvoir anonyme et non imputable qui fait craindre une déshumanisation de l’espèce. Le mondialisme défait toutes les frontières dont la nation a besoin pour préserver son intégrité. L’imputabilité, la responsabilité politique et la vertu publique à tous les niveaux doivent être plus que jamais encouragées. La nation souveraine représente elle-même une balise, un pouvoir intermédiaire, un dispositif de taille contre les dérives de notre temps. Sa juste émancipation contribue à l’équilibre et à l’apaisement du monde.

Les ambitions que nous avons pour notre peuple peuvent être facilement comprises à la lecture des onze questions qui précèdent. Avec la québécitude qui s’efforce de surfer sur un paradigme révolu, et le déplacement des centres de gravité à l’international, le contexte se prête pour faire passer dans l’opinion publique notre message d’espoir pour les Canadiens-Français. Nous citons ici quatre objectifs bien ciblés pour éveiller l’opinion publique et encourager la mobilisation.

  • Pour la reconnaissance explicite du peuple canadien-français dans la loi 99 (2000), la Loi « sur l’exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l’État du Québec », loi statutaire du Québec.

  • Pour la contestation continue de l’Acte constitutionnel de 1982 et la préparation d’une nouvelle élite patriotique tendue vers la reconnaissance des droits nationaux des Canadiens-Français et des Acadiens.

  • Pour le maintien dans l’actualité de la dialectique « d’égalité ou d’indépendance », car, pour tout horizon, le processus vers l’égalité nationale des Canadiens-Français devra se concrétiser dans une forme constitutionnelle idoine. Ce ne serait que justice.

  • Plaider vigoureusement auprès de toutes les instances internationales la cause des Canadiens-Français et des Acadiens, victimes d’une injuste hégémonie anglo-saxonne depuis les années 1755.