Les Saints Martyrs canadiens

Paroisse Saint-Fabien de Rimouski, statues offertes en 1945

Les Saints Martyrs canadiens, sept Jésuites et un « donné », périrent lors des guerres entre les Hurons et les Iroquois. Les trois premiers sont tombés en pays iroquois, les autres, lors d’attaques des Iroquois en pays huron. Ils sont :

René Goupil († 29 septembre 1642), frère

N’ayant pas terminé le noviciat à cause de sa surdité, il s’était porté volontaire pour assister les Jésuites en tant que “donné” dans leurs missions. Il prononça ses voeux au père Isaac Jogues et devint “frère” peu avant sa mort. Parti en canot des Trois-rivières vers le pays huron avec le père Isaac Jogues et Guillaume Couture, ils tombèrent dans une embuscade tendue par des Iroquois dans la région voisine de Lanoraie. Il y fut capturé et torturé. Il mourut plus tard d’un coup de tomahak à la tête en pays Iroquois à Ossernenon (aujourd’hui Auriesville dans l’état de New York). https://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Goupil

Isaac Jogues († 18 octobre 1646), prêtre

Capturé avec Goupil en 1642, il subit des tortures et fut traité comme un esclave par les Iroquois à Ossernenon, dont des marchands hollandais l’aidèrent à s’enfuir. De retour en France, il demande à revenir en Nouvelle-France et arrive en 1644. À Ossernenon en 1646 pour négocier la paix, il est abattu d’un coup de tomahak. https://fr.wikipedia.org/wiki/Isaac_Jogues

Jean de La Lande († 18 octobre 1646), donné

Arrivé à Ossernenon avec Jogues, il part à sa recherche ayant constaté sa disparition. Il est aussi abattu d’un coup de tomahak. https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_La_Lande

Antoine Daniel († 4 juillet 1648), prêtre

Dans le village de Teanaustayé en pays Huron survient une attaque des Iroquois alors que le père Daniel vient de terminer sa messe. Il dit à ses fidèles de s’enfuir et tente une diversion en marchant vers les Iroquois un crucifix tendu vers eux. D’abord stupéfaits, ceux-ci le criblent de flèches et l’achèvent d’un coup de mousquet. https://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine_Daniel_(j%C3%A9suite)

Jean de Brébeuf († 16 mars 1649), prêtre – Voir le récit plus bas.

Gabriel Lalemant († 17 mars 1649). prêtre – id.

Charles Garnier († 7 décembre 1649), prêtre

Blessé de deux coups de mousquet à la poitrine et à l’abdomen, il est achevé d’un coup de tomahak à la tête. https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Garnier_(j%C3%A9suite)

Noël Chabanel († 8 décembre 1649), prêtre

Il est assassiné par un Huron. https://fr.wikipedia.org/wiki/No%C3%ABl_Chabanel

Les martyrs canadiens furent béatifiés en 1925 et canonisés en 1930 par le pape Pie XI. Le sanctuaire des martyrs à Midland en Ontario, le site de leur action missionnaire auprès des Hurons, leur est dédié. Le village-mission de Sainte-Marie-au-pays-des-Hurons, base arrière des expéditions missionnaires, a été reconstitué et est aujourd’hui une attraction touristique importante de la région.

Ils sont collectivement des saints patrons secondaires du Canada. Cinq paroisses et une municipalité du Québec commémorent les martyrs canadiens. La paroisse francophone de Saskatoon en Saskatchewan est également placée sous la protection des saints Martyrs canadiens, tout comme celle de Pont-Landry (Nouveau-Brunswick), et celle des Saints-Martyrs-Canadiens fondée en 1961 dans le diocèse de Saint-Boniface au Manitoba. Un canton au Lac-Saint-Jean, plus précisément au sud de la rivière Péribonka, a aussi été nommé en l’honneur de Charles Garnier. (Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Martyrs_canadiens )


La vie des missionnaires chez les Hurons

par Mathieu Plourde Turcotte

Les Saint-Martyrs canadiens sont indissociables des missionnaires de la compagnie de Jésus venus s’établir parmi les communautés amérindiennes au 17e siècle. Les membres de cette compagnie que l’on nomme les Jésuites ont établi des relations avec les Amérindiens de plusieurs tribus. Les références parmi ces relations seraient, selon René Latourelle, prêtre jésuite, le père Biard pour les sauvages de la première Acadie, le père Lejeune pour les Montagnais et les Iroquois, le père Allouez pour les Outaouais et Brébeuf, à la suite de Champlain et de Sagard (Récollets), pour les études des Hurons1 . Les Saints-Martyrs canadiens ont donné suite à ces relations, déjà entamées avant eux, au sein du pays des Hurons. Le plus célèbre des Saint-Martyrs est le père Brébeuf qui, avec le père Ragueneau et Jérôme Lalemant (frère du martyr Gabriel Lalemant) furent les trois supérieurs jésuites de la Huronie. Au total, on peut compter huit martyrs: six prêtres jésuites, un Jésuite laïc et un domestique. Le premier à périr, un Jésuite laïc, car n’ayant pas fait sa prêtrise, se nomme René Goupil. Son décès remonte à 1643 après son enlèvement par les Iroquois. Le dernier, Noël Chabanel, fut tué par un Huron en 1649. Tous périrent durant la guerre que se livraient les Hurons et les Iroquois durant les années 1640.

Le père Brébeuf est né à Condé-sur-vire (commune qui a fusionné en 2016 avec Mesnil-Raoult) dans la région de Normandie au sein de la France de 1593. Il est dit de lui qu’il était doté d’un physique ressemblant plus à celui d’un athlète ou d’un conquérant que d’un missionnaire2 tout en ayant, en France, « une santé si défaillante qu’on s’était précipité pour l’ordonner prêtre parce qu’on pensait qu’il ne survivrait pas »3 . Ces problèmes de santé semblent disparaître en Nouvelle-France. Malgré qu’il doit réaliser une traversée de l’océan périlleuse. Malgré le voyage qui partait des Trois-Rivières en canot vers le pays des Hurons, situé le long de la baie géorgienne dans l’actuel Ontario. Ce voyage durait entre vingt et trente jours avec assez peu de nourriture pour se ravitailler. Le jeûne était ainsi enduré parce qu’il fallait alléger l’embarcation qui devait être soulevée à plusieurs reprises pour éviter les obstacles, les rapides, les torrents, les chutes. Une fois arrivé dans un village Huron, il fallait vivre parmi les puces des cabanes et des Hurons qui, lors des deux derniers séjours de Brébeuf, souffraient de la variole. Le principal enjeu fut d’apprendre leur langue. Brébeuf excellait particulièrement dans ce domaine. L’expérience des Récollets et des Ursulines, groupes de missionnaires qui échouèrent à les franciser, avait démontré que la conversion voulue par les Jésuites ne pouvait se réaliser qu’avec leur langue, voire même leur culture. Autrement dit, les Jésuites prirent conscience qu’ils devaient devenir en partie Hurons pour convertir les Hurons.

Le pays des Hurons était, au moment de l’arrivée des Jésuites dans leur village, en quelque sorte la Babylone de l’alliance laurentienne. Alliance au sein de laquelle l’on comptait les Français, les Algonquins et les Montagnais. La Huronie était la Babylone de ce temps parce que, habitée d’habiles commerçants, intermédiaire névralgique avec la puissance française dans les traites des fourrures, ce qui permettait d’en imposer à d’autres tribus, autosuffisante alimentairement parlant, sans être à l’abri d’une mauvaise récolte bien sûr, habitant un plus petit territoire (30 km par 604 ) devenu passage obligé pour plusieurs tribus amérindiennes. La Huronie de l’épisode jésuite périclitait malgré tout sous les guerres, les épidémies, les pillages (donc les famines) tout en évitant le fléau de l’alcool qui triturait le reste de l’alliance, sans qu’aucune forme de stabilité en Amérique ne puisse se passer de leur existence devant les attaques de l’alliance Hollande/Iroquoisie installée le long du fleuve Hudson. Précisons que l’alliance laurentienne en est une de guerre, puisque chaque membre d’une tribu n’était pas bien toléré au sein des autres nations tribales. L’acceptation des pères jésuites au sein de la nation tribale huronne se réalisa par intérêt. Autrement dit, les Français étaient mieux acceptés en Huronie que les autres nations amérindiennes.

Malgré ces épreuves, donc, le père Brébeuf se distingue et apparaît plutôt vigoureux. Le grand air et l’activité physique intense guérissent, semblerait-il, assez bien. Déduire que Brébeuf apparaît vigoureux n’est pas présomptueux quand l’on s’aperçoit que les Hurons le perçoivent comme le chef des Jésuites en raison de sa prestance. À noter que les Hurons valorisent énormément le physique (pratique pour suivre leur mode de vie) et les capacités oratoires, la rhétorique (pratique quand l’on ne maîtrise pas l’écriture), un trait et une aptitude au bavardage dans les limites de ce qui se traduit concrètement (aucune aptitude pour l’abstrait) dont ils sont, eux-mêmes, sans exception, bien pourvus. Les Hurons qui séjournèrent en France n’eurent, semblerait-il, aucune difficulté à apprendre le français5 . Étaient-ils d’une intelligence supérieure à nos Anglais et à nos immigrants d’aujourd’hui ? Lisez la langue huronne pour comprendre les années-lumière qui la séparent de la langue française.

Certains affirment que les Hurons pratiquaient même une forme d’eugénisme, éliminant ainsi les physiques moins avantageux. Aucune déformation ou infirmité observée chez les Hurons, pas même celle de parler anglais. Ce trait physique de « conquérant » dont était apparemment doté Brébeuf l’a sûrement aidé à se faire accepter, notamment par le clan de l’ours (l’un des quatre clans au sein des Hurons). Par ailleurs, son aptitude pour les langues a convaincu les Jésuites, selon le père Lalemant, de le désigner comme directeur de la mission en Huronie.

Deux comportements ne sont pas pardonnés par les Hurons et méritent la torture, voire la mort : la trahison et la sorcellerie6 . Ces deux comportements sont beaucoup plus sévèrement punis que le meurtre et le vol, pourtant légion (surtout le vol) parmi les Hurons. Le père Ragueneau mentionne qu’il n’en a pas toujours été ainsi, qu’autrefois la sévérité de la justice huronne s’acharnait sur un plus grand nombre de délits7 . Rappelons-le, le pays des Hurons était à la foi à un âge d’or, de prospérité et de décadence. Quoiqu’il en soit, les épidémies furent attribuées à la sorcellerie des Jésuites. Les sorciers hurons, de fieffés gredins selon les Hurons eux-mêmes, forme d’influenceurs de leurs temps, étaient tolérés dans le village jusqu’à un certain point.

Comme Brébeuf était le plus valorisé parmi les Hurons, en raison de son physique surtout, il fut aussi vu comme le plus puissant des sorciers une fois les pandémies démarrées… L’impression la plus tenace des Hurons consistait à croire que le baptême répandait la maladie8 . Accusation somme toute assez facile à monter en épingle vu que les demandes de baptême venaient souvent de Hurons sur le point de rendre l’âme. Le sort réservé au plus puissant des sorciers en situation de drame, à savoir une mise à mort en 1637 finalement non exécutée, puis la torture, n’a pas de quoi être envié sur terre. Envié plutôt au paradis. Ce seront toutefois les Iroquois qui, en le capturant lors d’un de leurs incessants raids, finiront par assassiner Brébeuf. Sa fin se raconte ainsi : « Ce qui frappe en lui, c’est la paix prodigieuse, souveraine, qui l’accompagne et l’auréole, cette paix qui a stupéfié ses bourreaux eux-mêmes et leur a inspiré le geste, puissant de symbolisme, de manger son cœur pour participer au courage invincible qui l’animait. Lalemant gémit, implore du secours, soumis à la souffrance. Brébeuf, lui, la domine cette souffrance, insensible aux feux et aux flammes, souffrant comme un rocher. S’il ouvre la bouche, c’est pour réconforter les siens, pour leur parler du ciel. »9

Durant trois séjours parmi les Hurons, soit entre 1626 et 1629, de 1634 à 1641 et de 1644 à 1649, Brébeuf a davantage étudié la vie sociale, politique et religieuse des Hurons, et beaucoup moins leur vie économique et militaire. Ses séjours en 1625 au sein des Montagnais et au sein de la tribu des Neutres (l’une des nations iroquoises) en 1640-1641 sont, cela va de soi, moins détaillés puisque beaucoup plus courts. L’on sait de son passage chez la tribu des Neutres que les Jésuites étaient copieusement injuriés et que Brébeuf se cassa la clavicule de manière à compliquer énormément son missionnariat. Les écrits de Brébeuf demeurent encore aujourd’hui la référence anthropologique, ethnologique, en ce qui a trait à la Huronie, même parmi ceux qui n’apprécient pas la religion, les Jésuites, etc.

La guerre entre Hurons et Iroquois qui vit la mort des saints martyrs canadiens et d’une grande partie de la population huronne, cette dernière selon les estimations d’environ 20,000 habitants au sein d’une vingtaine de villages, précéda la dispersion du pays des Hurons autour de 1650. Certains Hurons subsistèrent, une partie migrant vers les terres de Sillery à Québec, (des Algonquins et Montagnais protégés des Jésuites y demeuraient déjà) avant de se diriger vers ce qui allait devenir la réserve de Wendake en banlieue de Québec, d’autres au sein de tribus iroquoises voisines, généralement au sein de la tribu iroquoise des Pétuns. L’intégration de Hurons au sein de tribus iroquoises ne put se dérouler confortablement. Les Pétuns n’étaient toutefois pas les Agniers… Au début du XVIIIe siècle, suite à la Grande paix de Montréal de 1702 qui mit fin à des décennies d’affrontement entre Français, autrefois l’alliance atlantique, et Iroquois, le militaire français Lamothe Cadillac, en aurait repêché une centaine de ces Hurons qu’il croyait faire partie d’une des dix tribus perdues d’Israël dans le but de fonder une colonie qui allait devenir la ville de Détroit.

  1. Latourelle, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 1, préface Guy Frégault, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952, p.75
  2. Latourelle, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 1, préface Guy Frégault, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952, p.65
  3. Écrits en Huronie, Jean de Brébeuf, établi et annoté par Gilles Terrien, Bibliothèque québécoise, 2000, p.XIV
  4. Écrits en Huronie, Jean de Brébeuf, établi et annoté par Gilles Terrien, Bibliothèque québécoise, 2000, p.XXIV
  5. Écrits en Huronie, Jean de Brébeuf, établi et annoté par Gilles Terrien, Bibliothèque québécoise, 2000, p.XXVII
  6. Latourelle, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 1, préface Guy Frégault, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952, p.123
  7. Latourelle, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 1, préface Guy Frégault, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952, p.122-123
  8. Latourelle, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 2,, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952, p.20-21
  9. Latourelle, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 2,, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952, p.190


NOTES

Le spécialiste des missionnaires jésuites est Guy Laflèche, qui y a consacré une partie de sa vie. Laissons-le parler :

« En 1970. Lorsque j’ai eu la chance de lire pour la première fois les 56 relations écrites au XVIIe siècle par les missionnaires jésuites de la Nouvelle France, j’ai tout de suite été convaincu que deux textes exceptionnels devaient absolument faire partie du bagage de lectures de tous les Québécois. D’abord la Relation de 1634 de Paul Lejeune. Je l’ai éditée aux Presses de l’Université de Montréal en 1973 sous le titre Le Missionnaire, l’Apostat, le Sorcier. De toutes les relations des Jésuites, c’est la plus belle, la plus simple et la plus tragique. Mais il y en avait aussi quelques-unes qui étaient dramatiques, dont la lecture était à la fois fascinante et répugnante. Il s’agit de l’ensemble des récits portant sur ce qu’on appelait à l’école les «Saints Martyrs canadiens». […] Les Iroquois, Isaac Jogues et Jean de Brébeuf, ce sont des «personnages historiques», comme on dit. D’ailleurs, première et dernière question : qu’y a t-il de vrai dans cette histoire? Les Saints Martyrs canadiens existent terriblement dans notre imagination, mais ont-ils vraiment existes dans la réalité? Voilà donc pourquoi j’ai entrepris ce travail. »

De la génération de la Révolution tranquille, Laflèche exprime une manifeste difficulté à comprendre le courage et la foi ardente de ces personnages plus grands que nature. Sans aucun doute ils étaient exceptionnels à leur époque, qui a aussi produit nos ancêtres plus modestes mais non moins déterminés dans leurs tâches du quotidien.

Une autre époque, héroïque, celle-là. La lecture des tribulations intellectuelles de Laflèche nous informera sans doute de la difficulté à notre époque de saisir l’essence de la première. Qui sait, peut-être sa quête personnelle lui a t’elle porté fruit. On lui souhaite. Il faudra bien que l’un d’entre nous suive ses traces et en tire un constat.

La CONTROVERSE à propos des livres de Guy Laflèche sur les Saints martyrs canadiens

Pièce no.1

« N’emporte pas complètement l’adhésion, non plus, la prétention totalitaire de cette étude. La masse d’informations éblouit, c’est vrai; l’étendue des connaissances, la finesse des précisions et la subtilité des analyses est remarquable, sans conteste. Laflèche n’a pas fréquenté les Jésuites impunément, cela se voit : on pourrait difficilement imaginer casuiste plus redoutable. À la fois savant, intelligent, spirituel et passionné. Toutefois, sans doute faudrait-il qu’un érudit de sa taille, mais croyant celui-là, pose la question de ses œillères. Il se présente comme «un chercheur responsable, exempt de tout fanatisme et de tout préjugé» (p. 22); par ailleurs, il semble se réclamer du matérialisme historique (p. 234, 328) —tout en se disant hégélien! (p. 233) — ce qui laisse planer quelques doutes sur sa capacité de simplement comprendre la dimension spirituelle des faits, et cela indépendamment de la manipulation qu’a pu en faire l’institution cléricale. Au-delà de leurs aspects grotesques, répugnants, mystificateurs, ces événements ne renferment-ils pas quelque signification autre, qui est «folie pour le monde, sagesse pour Dieu»? Laflèche semble l’exclure au départ. D’ailleurs sa compréhension du christianisme semble particulièrement limitée (cf. p. 239).» Robert MAJOR https://www.erudit.org/fr/revues/lq/1989-n54-lq1175214/39111ac.pdf

Pièce no.2

« Adrien.T. : Comment et à quel moment vous est venue l’idée de faire une édition critique des textes consacrés aux récits des Saints Martyrs canadiens? »

« G.Laflèche : En 1970. Lorsque j’ai eu la chance de lire pour la première fois les 56 relations écrites au XVIIe siècle par les missionnaires jésuites de la Nouvelle France, j’ai tout de suite été convaincu que deux textes exceptionnels devaient absolument faire partie du bagage de lectures de tous les Québécois. D’abord la Relation de 1634 de Paul Lejeune. Je l’ai éditée aux Presses de l’Université de Montréal en 1973 sous le titre Le Missionnaire, l’Apostat, le Sorcier. De toutes les relations des Jésuites, c’est la plus belle, la plus simple et la plus tragique. Mais il y en avait aussi quelques-unes qui étaient dramatiques, dont la lecture était à la fois fascinante et répugnante. Il s’agit de l’ensemble des récits portant sur ce qu’on appelait à l’école les «Saints Martyrs canadiens». Cet ensemble de récits est proprement insoutenable, exactement comme le Livre de Job et les grands textes du marquis de Sade. Plus terrible encore, parce que le divin marquis et le plus saint des hommes sont ici des êtres concrets, des personnes réelles que nous connaissons tous depuis notre enfance. Les Iroquois, Isaac Jogues et Jean de Brébeuf, ce sont des «personnages historiques», comme on dit. D’ailleurs, première et dernière question : qu’y a t-il de vrai dans cette histoire? Les Saints Martyrs canadiens existent terriblement dans notre imagination, mais ont-ils vraiment existes dans la réalité? Voilà donc pourquoi j’ai entrepris ce travail. » https://www.erudit.org/fr/revues/lq/1989-n56-lq1176284/39150ac/


Bibliographie

  • BOUCHART D’ORVAL, Paul, Au coeur de la Huronie. Sur les pas des Saints Martyrs Canadiens. Aux éditions du Calumet brisé, Montréal, 1949. in-12, 219 pages Adrien Pouliot
  • DE BRÉBEUF, Jean, Écrits en Huronie, établi et annoté par Gilles Terrien, Bibliothèque québécoise, 2000
  • LATOURELLE, René, Études sur les écrits de Jean de Brébeuf, volume 1, préface Guy Frégault, studia collegii maximi imaculatae conceptionis, Montréal, 1952