Ballottés entre « le grand soir » et « les petits pas »
(Publication originale le 27 janvier 2021 sur gilles-verrier.blogspot.com)
Il y a vingt-cinq ans, le 29 janvier 1996, Lucien Bouchard devenait premier ministre du Québec. Trois mois plus tôt, Jacques Parizeau avait annoncé sa démission dans la controverse, immédiatement après l’annonce des résultats du référendum du 30 octobre 1995.
Ceux qui ont vécu ces événements s’en souviennent, les autres en connaissent l’existence. Ces quelques mois d’accélération historique ont marqué profondément le Québec. La défaite référendaire nous poursuit aujourd’hui à travers des perspectives nationales qui se sont assombries; le souverainisme ne soulève plus les masses. Les universitaires, biographes et chroniqueurs se sont bien efforcés de donner un sens aux échecs successifs, mais la plupart se sont arrêtés avant de fournir une critique approfondie d’un souverainisme devenu institutionnel. Pour tout ce qui a été publié, il se trouve qu’on n’était pas prêt à égratigner un paradigme national qui a mal vieilli. Ce texte est écrit dans le but de mettre en lumière ce qui m’apparaît comme l’angle mort de ces analyses qui continuent de valider un échec.
Bref, tous ceux qui se sont penchés sur la question n’ont pas voulu établir une relation entre les aventures référendaires, génératrices d’un incontestable déclin, et quelque chose de plus fondamental : le désamour de notre être national canadien-français. Ayant perdu nos ressorts historiques, la boussole des peuples, la question nationale a dévié de sa trajectoire pour changer de cap. Le néonationalisme a manqué à toutes ses promesses et apparaît aujourd’hui dépassé. En revanche, ce qui avait été jugé dépassé remonte aujourd’hui avec une pertinence nouvelle. Et sans surprise, ceux qui veulent démontrer la valeur de l’identité canadienne-française, dans un combat qui du reste a toujours été celui des Canadiens-Français, proviennent de milieux extérieurs à l’intelligentsia en place.